Un court message ce week-end, organisé autour du commentaire d’un livre. Au cours de la rédaction de mon bouquin l’été dernier, je me suis réalisé une «pile de livres à lire » que je commence cette année. Le livre de Charles Perrow « Complex Organizations » est le premier de cette pile, c’est en fait un "incontournable" que j’aurais du lire plus tôt … Les prochains, que je lis en ce moment sont « The complexity of Cooperation » de R. Axelrod et « Organizations » de J. March et H. Simon. La proximité entre ce que je fais et ces deux derniers livres est exceptionnelle, j’y reviendrais.
Voici donc une liste de quelques idées clés retenues dans le livre de Charles Perrow, à cause de leur pertinence par rapport au thème de ce blog. Comme pour le livre de Watts, ce n’est pas une « fiche de lecture fidèle »…
- Une réflexion sur l’émergence naturelle de « surplus » dans une bureaucratie, c’est-à-dire (dans ce contexte) une organisation fortement hiérarchique. L’analyse des bureaucratie inclus une réflexion passionnante sur le « span of control », ou l’on retrouve des arguments déjà exposés dans ce blog (des deux cotés du dilemme « hiérarchie plate » vs « hiérarchie profonde »). En particulier, il cite P. Blau sur l’importance du temps nécessaire pour l’échange entre les managers et leur subordonnés directs dans des situations complexes.
- Une réflexion sur la relation entre l’organisation et les flux d’information qui est précisément le sujet de ce blog. Je vous livre à titre d’exemple cette citation que je pourrais reprendre : « The hierarchy established routes of communication where information was needed and levels where certain kinds of decisions could be made ». Charles Perrow propose une abstraction de la hiérarchie autour de trois fonctions : la communication, la gestion des connaissance et la prise de décision. Les réflexions sur la formalisation de la prise de décision m’ouvrent des portes pour améliorer mon propre modèle.
- Il propose une description très intéressante du modèle de H. Simon en terme d’entreprise. La proximité intellectuelle avec le modèle générique proposé dans SIFOA (modèle autour des processus) est frappante (y compris dans la démarche), j’y reviendrai après avoir lu le livre de H. Simon. En particulier, la communication y joue un rôle structurant, et est organisée suivant les canaux (sounds familiar ?) et leurs poids respectifs.
- Charles Perrow propose une analyse des conflits dans l’entreprise, avec en particulier une description du modèle des « garbage cans », qui « greatly illuminates the micro organizational process of group dynamics, intergroup relations and the dilemnas of leadership, … it makes some kind of sense out of the bewildering shifts, turns, and unexpected outcomes in daily organizational life ».
- De façon similaire, il étudie également le sujet de la centralisation/decentralisation en fonction du “coupling” (ce que j’ai désigné par le “degré de transversalité” des processus dans mon modèle) et la complexité. Sa conclusion, traduite dans le contexte des entreprises modernes, est en faveur de la décentralisation (cf. 2eme partie de mon livre).
- Pour finir, ce livre contient un « survey » de différents modèles du fonctionnement de l’entreprise, tels que les modèles « population ecology » ou le modèle des « coûts de transactions » originellement du à Coase. En particulier, l’approche de R. Nelson et S. Winter dans « An Evolutionary Theory of Economic Change » semble très intéressante pour mon approche (je viens d’ajouter le livre à ma pile :)). Ce modèle s’intéresse à la mémoire organisationnelle (« Organizations remember by doing »), qu’il s’agisse de procédure ou de processus.
J’ai présenté la méthode « Simulation par Jeux et Apprentissage » lors de la dernière conférence ROADEF-FRANCORO (Recherche opérationnelle) à Grenoble, et je suis revenu avec quelques idées neuves, et une meilleure compréhension de la recherche des équilibres. J’en parlerai lors d’un prochain message. Une des priorités en ce moment est de réaliser un « automate à simulation », parce que l’exploration telle que je la pratique (en lançant des « expériences » à la main) n’est pas assez systématique pour tirer des enseignements convaincants.
Une des autres idées qui me trottent dans la tête est de reprendre les simulations de Duncan Watts en introduisant les informations de fréquence de contact dans les réseaux sociaux (graphes étiquetés). Cela a un double intérêt : scientifique, pour voir si l’ajout de cette information permet de confirmer et raffiner les résultats de Watts, et pratique (par rapport à mon objectif d’étude des organisations) pour mieux caractériser le réseau d’affiliation (alias « le système réunion ») pour ma propre simulation.